Conférence
Recherche de fonds/dons: doit-on savoir parfois dire non? Les réponses d’un banquier engagé
Cycle de conférences EMBA
Monsieur Cédric Anker, membre du comité exécutif de la banque Bordier & Cie et président du Conseil de fondation de Switzerland for UNHCR, le partenaire national pour la Suisse de l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés (HCR), a apporté son expertise et a partagé son expérience pour fournir au public présent plusieurs éléments de réflexion concernant les aspects techniques, économiques, éthiques et philosophiques sous-jacents à l’activité de recherche de fonds.
M. Nicolas Montandon, Maître d’enseignement HES, Co-Directeur de l'Executive MBA & M. Cédric Anker, membre du comité exécutif de la banque Bordier & Cie et président du Conseil de fondation de Switzerland for UNHCR.
Vendredi 6 mai 2022, Cédric Anker a ainsi dialogué avec les participants et les participantes de l’EMBA de la HEG Genève, ainsi qu’avec les autres personnes invitées.
En lien avec son parcours professionnel, il a d’abord montré les différences existantes entre la gouvernance d’un établissement bancaire et la gouvernance d’un organisme à but non lucratif.
«Pour s’engager dans une fondation comme Switzerland for UNHCR – ou une autre organisation de même nature –, il faut savoir ce que l’on est capable de donner et définir précisément également nos attentes en retour. Les réponses à ces questions sont forcément différentes de celles que l’on donnerait dans le cas d’un emploi rémunéré dans le secteur privé. On ne reçoit pas d’argent quand on s’engage pour la défense d’une cause, on reçoit autre chose, des récompenses humaines, immatérielles, morales, spirituelles ou intellectuelles dont la nature exacte correspond à la personnalité de chacun et de chacune. Pour ma part, je souhaite pouvoir donner un peu de tout ce que j’ai reçu, un peu de ce que Genève, ville où j’ai grandi, a pu m’offrir comme chances.»
Cédric Anker a aussi montré, lors de cette conférence EMBA, les spécificités de la recherche de fonds en Suisse, un pays polyglotte et pluriculturel
«Il faut un spécialiste de la recherche de fonds pour chaque région linguistique; c’est indispensable» –, avec des populations et des publics très différents – «On n’appliquera pas les mêmes méthodes de recherche de fonds pour toucher le plus grand nombre ou, à l’inverse, pour communiquer uniquement avec quelques personnalités très fortunées».
Autre question abordée pendant la conférence EMBA: en matière d’aide humanitaire, doit-on accepter tous les dons? Un refus s’impose-t-il quelquefois?
Le HCR a par exemple mis en place des règles strictes de «due diligence»: ainsi, l’agence onusienne ne peut pas recevoir de fonds de la part d’une entreprise active dans l’industrie du tabac. Dans ce contexte, Cédric Anker apporte de surcroît quelques nuances supplémentaires: «Dans certaines situations exceptionnelles – comme celle d’aujourd’hui, marquée par la guerre en Ukraine –, nous recevons parfois des dons très importants d’entreprises ou de particuliers. Une organisation donatrice serait porteuse d’une réputation sulfureuse? Ici, il n’y aurait pas de débat et les fonds offerts seraient refusés. La difficulté intervient quand le jugement ne peut pas être aussi précis, quand différents éléments parlent en faveur du donateur alors que d’autres parlent en sa défaveur».
Que faire alors?
«Agir avec méthode est la règle. Il faut consulter rapidement les membres du Conseil de fondation et faire une pesée d’intérêts. Comment est-on capable de communiquer concernant cette donation? Quels sont les risques? In fine, en tant que président du Conseil de fondation, vous êtes le seul à décider: vous devez pouvoir assumer publiquement la position et la décision de votre organisation, y compris devant les médias.»
L’activité bancaire de Cédric Anker l’a-t-elle aidé à se préparer pour son rôle au sein de Switzerland for UNHCR?
«Oui, bien sûr, ma fonction chez Bordier & Cie m’a permis de posséder des outils utiles pour agir efficacement en faveur de Switzerland for UNHCR. Certaines formations que j’ai suivies ont aussi été des aides précieuses. Toutefois, il existe un apprentissage qui se fait «dans l’action», par exemple lors de la gestion de crises très graves, comme celle que connaît aujourd’hui l’Ukraine. Dans ce dernier cas, il faut signaler que mon rôle implique de prendre en compte l’urgence d’un immense désastre humanitaire, tout en n’oubliant pas les autres drames qui ravagent différentes régions du monde.»
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